La réalité du dispositif Mon soutien psy : pourquoi je choisis de ne pas y adhérer !
Eclairage du Manifeste des Psychologues Cliniciens et des Psychologues Psychothérapeutes.
Depuis 2022, le gouvernement a mis en place le dispositif Mon Psy, maintenant devenu Mon Soutien Psy. Dans cet article, je vous explique ce que représente vraiment ce dispositif et les raisons pour lesquelles je choisis pour l'instant de ne pas y adhérer tout comme 94% des psychologues en France !
1. Une sélection des patients concernés
Vous avez certainement entendu beaucoup de "pub" dans les médias sur Mon soutien psy. Le gouvernement annonce la gratuité des séances pour tous mais la réalité est bien différente.
Ce dispositif ne concerne que les patients ayant des troubles légers à modérés. Finalement pour être suivi il ne faut pas avoir de souffrances trop importantes...
Ainsi sont exclues du dispositif Mon soutien psy les personnes qui souffrent de :
- dépression majeure
- idées suicidaires
- traumatismes psychiques
- troubles anxieux sévères
- antécédents psychiatriques
- addictions à des substances
- troubles du comportements alimentaires avec signes de gravité
Vous l'aurez compris, cela exclu en réalité la plupart des patients que nous voyons dans nos cabinets.
Vous pouvez retrouvez ces critères d'exclusion sur le site de la CPAM : https://www.ameli.fr/lille-douai/psychologue/exercice-professionnel/patients-concernes
La CPAM présente ces critères d'exclusions sous couvert de la nécessité d'un avis médical. Le fait est que les psychologues travaillent déjà en collaboration avec les psychiatres alors qu'est-ce qui justifie la non prise en charge des séances pour ces patients si ce n'est le manque de moyens financiers ?
2. Un temps de soin limité
Le dispositif Mon soutien psy prend en charge 12 séances : 1 première séance d'évaluation et 11 séances de suivi. Avez-vous déjà remarqué qu'il n'y a pas de nombres de séances imposées pour les autres professionnels de santé ? Ce sont eux qui définissent le nombre de séances nécessaires pour faire un travail de qualité.
En effet, certains patients ont besoin de plus de temps que d'autres et c'est tout à fait normal. Certaines problématiques nécessitent également plus de temps de travail que d'autres et ce même quand ont fait des thérapies brèves.
3. Une absence de moyens supplémentaires
Le gouvernement met en avant la prise en compte de l'augmentation de la souffrance psychique derrière ce dispositif. Cela semble est une opération politique et marketing. En effet, il n'y a pas de moyens supplémentaires qui ont été débloqués pour le dispositif mon soutien psy : le financement se fait au détriment des structures de soins psychiques existantes.
Il est très important de savoir que la gratuité des soins psychiques en France existe depuis plus de 50 ans. Ce sont les CMP (Centres Medico Psychologiques) qui assurent ces soins avec des équipes pluridisciplinaires composés d'infirmiers, de psychologues, d'assistantes sociales et de psychiatres. Malheureusement depuis plusieurs années, les moyens alloués ont été considérablement réduits ce qui explique pourquoi les patients peinent à obtenir des rendez-vous au sein de ces structures.
La CPAM réalise ces derniers mois un démarchage important auprès des psychologues salariés afin de les inciter à diminuer leur temps en institution pour s'installer en libéral. Allons-nous vers une privatisation des soins comme c'est le cas dans d'autres pays ?
4. Oui au remboursement mais pas n'importe comment !
Vous l'aurez compris, ce n'est pas la gratuité des séances qui pose problème aux psychologues. La profession et moi même sommes bien sûr pour la prise en charge de la psychothérapie. Nous boycottons massivement ce dispositif car la manière dont il est construit nous fait peur pour l'avenir de la qualité des soins psychiques en France.
Vous retrouverez dans cette vidéo d'un collègue psychologue, un éclairage très complet de la réalité de ce dispositif depuis sa création.